^THEATRE DE LA VIOLETTE OCTOBRE 2010
Trick or treat , s’apprêtent à crier les enfants des pays anglo-saxons
T
tous fantômes d’un soir, squelettes ou sorciers. Un tour ou des bonbons…
Eh oui, voici revenir le temps d’Halloween, fête moins américaine qu’irlando-gauloise, quand bien même les manies de nos temps en ont fait un des symboles du consumérisme importé. Reste que c’est sans doute l’un des premiers de nos Premiers de l’An, puisque le 1er novembre correspond peu ou prou au samain, fête celtique du passage à l’année nouvelle. Et puisque la circonstance tombe au beau mitan des vacances d’automne, le Théâtre de la Violette en profite pour programmer durant toutes lesdites Nicolas et la cocotte, spectacle de musique et de contes concocté par la Cie A Cloche-Pied pour les plus de quatre ans, et dont le titre ne laisse guère deviner la teneur diabolique.
« Eh la petite mamie, viens par ici que je te croque ! »
Il serait donc une fois un petit Nicolas – non, pas celui de Sempé et Goscinny – tout frisé et tache-de-roussé, avec une vache, une maman folle de chocolat et un secret. Que nous allons dévoiler aussitôt, puisque le spectacle en fait autant : la maman de Nicolas, c’est une sorcière. Si. Nommée Grabouilla (il y a des parents qu’on devrait embastiller…). Sauf que Nicolas, lui, ne le sait pas et le découvre par vache sèche, vol en cheminée, sabbat à jupes retroussées, jus d’asticots, yeux en gelée et respectueux bisou à la fesse droite du Grand Cornu. Fichtre.
La suite n’est qu’aventures pour le petit Nicolas, toutes liées à cette fichue cocotte qui lui met des rogloglos à l’estomac et qui ne cesse de galoper, croiser boulanger, fermière et roi, l’emportant au pays de Jack O’Lantern, à la noce de la petite mamie (enfin, pas de la mamie mais de sa petite-fille…) que le loup voulait croquer, chez le père Lustucru et sa grosse dame, quoi d’autre ? Lui faisant passer tourbière, cimetière, château, rivière, vieux chêne, grand route où erre l’Ankou jusqu’à retomber sur et dans cette fichue cocotte et se retrouver enfin chez lui, près de sa sorcière de mère, repu et les poches pleines d’or sonnant et trébuchant. Ouf.
« Sorcière sorcière, c’est bien fait pour toi »
La Cie A Cloche-Pied est une habituée des lieux, où on l’a vue donner Babaye sur le chemin du bout du monde aux tout-petits et, dans sa version « pour adultes », rendre un respectueux hommage à Brassens avec les Bigres du Tergal. Elle y sévit d’ailleurs aussi, tous les matins des vacances à 11h, dans Les vacances de mémé Bisous – pour tout-petits encore.
Sa spécialité ? Le conte donné en musique, madame plutôt à la parlotte (mais pas toute seule), monsieur plutôt à la musique (mais pas tout seul). Une musique que la thématique halloweenienne porte cette fois-ci du côté celtique de la partition, sans trop pousser sur la découverte d’instruments variés : guitare, harmonica, tambourin, cloche, tubes bambous et percussions diverses, au service de chansons maison dont la reprise par fragments selon épisode constitue un fil rouge efficace pour l’ensemble ; et, accessoirement, un moyen parmi d’autres de jouer sur la participation du public.
Un public ravi. Pensez donc : des péripéties en nombre qui font un peu peur mais pas trop ; des cochoncetés dégueulbifs à base de chauves-souris, de crapauds et de fesse de diable ; un fil fondamentalement linéaire (donc facile à suivre), mais entortillé à plaisir par un jeu de contes emboîtés façon poupées gigognes et les intermèdes musicaux (ce qui met un peu de piment dans l’affaire) – que demander de plus ? Cela rit donc, s’exclame tout à trac, répond sans barguigner aux sollicitations venues de la scène et bat joyeusement des mains sur la chanson finale : un succès en salle comble. « Sorcière sorcière, c’est bien fait pour toi… » ||
Jacques-Olivier Badia